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 DNN, Microsoft, l'Open Source...

Benoît Sarton. 4 juin 2005

Le 1er juin 2005, Microsoft a présenté aux hébergeurs son programme destiné à développer les offres d'hébergement sous Windows. DotNetNuke sera proposé en standard dans la solution. Quelques membres de notre communauté participaient à l'événement. Analyse.


Avec le temps Microsoft n’a rien perdu de son exceptionnelle capacité d’adaptation aux grandes tendances du moment. Pour cette entreprise, l’agilité n’est pas qu’un concept marketing ; c’est une véritable culture.

DotNetNuke, plateforme Open Source, sera donc proposée en standard dans la « Solution for Windows-based hosting version 3.5 », un programme pour les hébergeurs. http://www.microsoft.com/serviceproviders/solutions/windowsbasedhosting.mspx

Quel est le sens de cette initiative, qui rend hommage à l’énorme progression de la « plateforme DNN », et conforte ceux qui ont misé sur ce projet ?

Notons tout d’abord qu’il serait injuste d’accuser Microsoft d’opportunisme. L’ancêtre de DotNetNuke était bien une sorte de starter kit lancé comme une graine dans l’écosystème de l’Open Source. Il a survécu à la sélection naturelle, et avec son succès grandissant, Microsoft récupère légitimement sa mise. Notons à ce propos quelques petites coïncidences bien curieuses dans la grand chaos de l’évolution des espèces logicielles : ASP v2 offrira un membership provider ? DotNetNuke l’implémente déjà. Les hébergeurs ont besoin de ‘load balancing’ ? La v 3.1 de DNN s’adapte à cette possibilité dans une version ‘web farms’. Hasard ou nécessité ?

Mais en réalité la reconnaissance de DNN par Microsoft s’inscrit dans une stratégie beaucoup plus vaste. Celle-ci a été exposée aux hébergeurs lors d’une tournée de séminaires au niveau mondial. Shaun Walker, Peter Donker et quelques autres membres européen du Core Team étaient présents à Amsterdam la semaine dernière. Et quelques membres de notre groupe francophone (BSI, Imatech, Aricie, Mixtrio, Supinfo) – se sont retrouvés pour la présentation parisienne le 1er juin 2005.

A la finesse des petits fours, les habitués de ce genre d’exercice ont cru déchiffrer que « l’ogre de Redmond » prend la chose au sérieux. Steve Ballmer, le patron, n’est pas content du retard pris sur le marché de l’hébergement face à la triade Linux – Apache, MySQL, php (LAMP). Et il a décidé de s’en occuper personnellement. Comme au bon vieux temps du combat MS-DOS contre CP/M : Oui, on est derrière Linux. Non, ce n’est pas normal, il ne peut s’agir que d’un malentendu. Oui, on est meilleurs. Non, on n’est pas plus cher. On a travaillé dur (Windows 2003, iis6). Nos p’tits gars ont fait un super bon boulot et il vont continuer (asp.net 2, iis7, stay tuned). Ne laissons pas une génération s’égarer en la privant des grandes joies de la programmation .net, pour une malheureuse question de prix. Demain, ils seront prescripteurs chez nos clients.

DotNetNuke donne corps à cette stratégie de reconquête et la crédibilise.

Visual Studio et SQL seront bientôt accessibles pour quelques tickets de resto-U.

L’utilisateur néophyte disposera bientôt d’une large offre d’hébergement sur des petits portails personnels simple à utiliser et bon marché. Parions même qu’à l’instar des adresses email, le consommateur ne se contentera pas d’un unique « site perso », mais qu’il ouvrira des sites thématiques comme on charge une musique de smartphone : l’anniversaire de ma copine, mon voyage en angleterre, la naissance de bébé, mes exploits sportifs, mon blog. Certes, les nuls se fichent comme d’une guigne de savoir s’ils sont « sous linux » ou « sous Windows ». Mais le fait d’être « sous Windows », même s’ils l’ignorent, leur rappellera quand même mieux MSN. C’est ce qu’on appelle « une expérience riche ». Et c’est bon pour la cause.

L’amateur éclairé, qui s’y connaît en informatique, et conseille à tout va amis, collègues et employeur, pourra mettre en valeur ses compétences sans trop renier ses convictions philosophiques. Ne dites pas à ma mère que je suis sous Windows, elle me croit en Open Source.

Quant aux nombreux professionnels qui recherchent efficacité, productivité, sécurité et pérennité – sans a priori idéologique – ils préfèrent généralement Windows, dès lors qu’il offre des solutions aussi compétitives que les équivalents LAMP. Pourquoi se compliquer avec du Linux si on peut avoir la même chose en Windows au même prix ?

Au-delà des questions de prix et de licences habituellement associées au concept de logiciel libre, Dot NetNuke illustre brillement un autre aspect de l’Open Source qui est la mise en œuvre d’un éco-système qui s’enrichit de tout ce qui s’y passe. La multiplication des sites ouvre un marché mondial pour les créateurs de thèmes, de modules, de tutoriels, de gabarits verticaux, et, demain, de webservices. Tous ceux-ci valorisent la plateforme, et incitent à la rejoindre. Les développeurs ont accès à un code source de haut niveau pour s’initier aux techniques de développement les plus pointues. Ils peuvent valoriser leurs compétences sur le web ou sur le poste de travail, en VB, en C# en SQL.

Et les entreprises hébergées ont tout intérêt à partir sur une plateforme standardisée, connue, et maintenue par une communauté dynamique. Parce que le copain-qui-s’y-connaît-en-sites-web ne sera sans doute plus là dans 2 ans pour maintenir ses scripts géniaux.

Ce magnifique cercle vertueux ne pourra toutefois fonctionner que si l’Open Source perd son image caricaturale de « tout gratuit » et de « librement copiable », pour prendre son véritable sens dans l’organisation collective du travail. Une articulation qui n’est pas toujours évidente pour nos entreprises endurcies au mode de fonctionnement compétitif, structuré par la relation client-fournisseur, et la méfiance vis-à-vis de la concurrence. Il y a là un véritable challenge qui attend la communauté Open Source sous Windows, dans doute moins expérimentée au travail collaboratif que ses homologues du monde Linux.

Dans les prochains mois notre communauté francophone devra faire cohabiter la Cathédrale et le Bazar (du livre d’Eric S. Raymond, O’Reilly, considéré comme l’un des premiers théoriciens de mode de fonctionnement en Open Source). Microsoft, qui connaît la force des mots, et maîtrise parfaitement leur usage, ne devra plus dire « nos concurrents Open Source », mais notre concurrent Linux (ou apache, php, etc). Parce que l’Open Source n’est pas une marque, ni une plateforme, ni une religion, et qu’il y a maintenant de l’Open Source Windows.

Quel que soit votre niveau, ce que vous avez fait peut être utile à d’autres. Il n’est pas nécessaire que ce soit grandiose. Mais il faut que ça soit fini, testé, simple, conforme aux manies orthographiques imposées par les vieuxxx, et que ça marche. La communauté, à commencer par ce site, saura vous aider à vous faire connaître, à valoriser votre savoir-faire. Microsoft nous a demandé d’identifier les compétences et de lui communiquer.

Dans cette attente, nous souhaitons le meilleur à vos projets web. Sur serveur Windows, bien évidemment.